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Le changement climatique pourrait reprogrammer les moustiques du paludisme

First-of-its-kind, realistic climate simulations reveal how warming and humidity changes rewire Anopheles stephensi biology and immunity.
Anopheles stephensi larvae_banner

Selon de récentes recherches menées à l’Institut de Médecine Tropicale (IMT) d’Anvers, les changements quotidiens de température et d’humidité transforment en profondeur la biologie et l’immunité du moustique Anopheles stephensi, principal vecteur du paludisme. L'étude, publiée dans Global Change Biology, remet en question l'utilisation habituelle de conditions statiques en laboratoire et montre que des variations environnementales réalistes imitant le changement climatique accélèrent la croissance des moustiques, augmentent leurs chances de survie après une infection, et modifient même leur système immunitaire. Cela pourrait avoir de graves conséquences sur la transmission du paludisme.

Dans la nature, le climat évolue sans cesse. Pourtant, les recherches en laboratoire continuent de se baser sur des conditions stables et optimales, qui n’existent pas dans le monde réel. Notre travail montre que les variations climatiques quotidiennes sont cruciales. Si on les ignore, on peut se tromper sur la façon dont les moustiques et les maladies qu'ils propagent réagiront au changement climatique 

Maria Luísa Simões, Professeure d'immunologie expérimentale et Cheffe de laboratoire à l'IMT

Simões Lab_small Le laboratoire de Simões

Une approche unique

Pour la première fois, les chercheurs ont exposé des moustiques à des fluctuations horaires contrôlées de la température et de l'humidité, sur la base de modèles météorologiques et de prévisions climatiques.

Cette nouvelle approche montre que des conditions plus chaudes et plus humides (1) renforcent l'immunité de base des moustiques avant l'infection, (2) accélèrent leur croissance, (3) augmentent leurs chances de survie après l'infection et (4) provoquent l'activation ou la désactivation de certains gènes de défense. En d’autres termes, le climat influence la façon dont le moustique module génétiquement ses défenses contre les parasites du paludisme.

Les résultats suggèrent que les conditions de laboratoire conventionnelles peuvent sous-estimer la résistance des moustiques au stress climatique, et que les moustiques pourraient en réalité être plus adaptables, voire même prospérer en cas de stress climatique.

Cover Global Change Biology Image de couverture : les larves de 𝘈𝘯𝘰𝘱𝘩𝘦𝘭𝘦𝘴 𝘴𝘵𝘦𝘱𝘩𝘦𝘯𝘴𝘪 élevées dans des conditions chaudes et humides fluctuantes (à droite) se sont développées plus rapidement que celles élevées dans des conditions de température et d'humidité plus basses (à gauche), comme le montre leur taille plus importante trois jours après l'éclosion des œufs. Photo prise par le laboratoire Simões.

Impact sur les villes africaines

Anopheles stephensi, originaire d'Asie du Sud, se répand actuellement en Afrique. Cette espèce constitue, particulièrement dans les zones urbaines, une menace pour la lutte contre le paludisme, et pourrait entraîner des épidémies plus difficiles à contrôler dans les villes densément peuplées.

« Les villes se comportent souvent comme des îlots de chaleur: elles sont plus chaudes que la campagne environnante. Notre étude montre qu'il est important d'utiliser des données climatiques réalistes afin de mieux prévoir le paludisme dans ces environnements changeants et de s'y préparer », explique la Professeure Simões.

Implications pour les boutons génétiques d'activation et de désactivation

L'une des principales conclusions de l'étude est que les boutons "on" et "off" des moustiques génétiquement modifiés (GM) sont sensibles aux variations climatiques. Les moustiques génétiquement modifiés dont le génome a été modifié, constituent un outil prometteur dans la lutte contre les maladies. Mais le fait que leurs interrupteurs génétiques intégrés soient sensibles à la température et à l'humidité signifie que leur fonctionnement peut dépendre de l'environnement.

« Nos résultats montrent que les outils génétiques basés sur les moustiques doivent être testés dans des conditions climatiques qui reflètent la réalité », explique M. Simões. « Un gène qui confère une résistance aux parasites du paludisme à une température constante de 27 °C et une humidité de 75 % en laboratoire, peut fonctionner de manière très différente dans les conditions climatiques changeantes d'une ville africaine ».

Le laboratoire de Simões intégrera ces simulations climatiques réalistes dans le développement de moustiques anophèles transgéniques. Ce faisant, l’IMT joue un rôle de premier plan dans le développement de stratégies génétiques de lutte contre le paludisme adaptées au changement climatique.

Lemos‐Silva, T., De Neef, E., Valgaerts, Y., & Simões, M. L. (2025). Fluctuating Warm and Humid Conditions Differentially Impact Immunity and Development in the Malaria Vector Anopheles stephensi. Global Change Biology31(8). https://doi.org/10.1111/gcb.70382

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