Ne laissez pas le moustique (tigre) vous piquer au vif


Pouvez-vous nous dire brièvement ce qu’est MEMO+ et ce qu’il implique ?
WIM Le project MEMO+ est un programme de surveillance du moustique tigre. Nous voulons cartographier précisément sa présence. C’est essentiel, car connaître les emplacements exacts nous permet de comprendre et, si possible, de limiter la propagation de l’insecte.
Qu'est-ce que le moustique tigre asiatique et pourquoi pose-t-il une menace ?
WIM Le moustique tigre asiatique (Aedes albopictus) peut transmettre des virus que nos moustiques indigènes ne transmettent pas. Les virus les plus connus sont la dengue, le chikungunya et le zika. Depuis les années 1980, le moustique s'est établi en Europe. D'abord en Albanie, puis en Italie et en France. Aujourd'hui, nous constatons qu'il fait également son apparition chez nous, notamment par le trafic automobile. Notre objectif est de cartographier ce phénomène pour identifier les mesures à prendre.

Pouvez-vous donner un exemple d'endroit en Belgique où le moustique tigre est déjà détecté ?
WIM Depuis 2000, nous avons détecté le moustique tigre dans environ 48 endroits en Belgique. Cela ne signifie pas qu’il s'y est effectivement établi ; il peut s’agir d’une seule observation. En 2022, nous avons lancé MEMO+, un projet de science citoyenne, qui nous a permis de mieux comprendre sa propagation. Auparavant, nous nous concentrions principalement sur ce que l’on appelle les « points d’entrée », tels que les fabricants de pneus, les commerces de plantes et les ports. Mais depuis 2018, nous les voyons de plus en plus sur les parkings le long des autoroutes, en particulier sur les routes vers le sud de la France, où le moustique est basé. Grâce à la science citoyenne, nous les trouvons dans les zones résidentielles, avec de nombreux rapports le long de l’axe Bruxelles-Anvers et autour de Gand. En Flandre, les signalements sont pour l’instant plus nombreux qu’en Wallonie.
Le projet MEMO entre dans son quatrième cycle de financement. Pourquoi un financement supplémentaire est-il encore nécessaire ?
WIM Le moustique tigre est une espèce invasive. Alors qu’il n’apparaissait que sporadiquement, on le voit maintenant revenir chaque année dans plusieurs endroits. Le suivi de ces introductions est essentiel. En fait, un financement structurel serait préférable, car le problème ne disparaît pas. Le moustique peut survivre à l’hiver et s’établir ici. Nous voulons, d’une part, cartographier sa propagation et, d’autre part, déterminer comment contrôler la population pour réduire le risque de transmission du virus.

Quelle serait la situation dans 15-20 ans sans recherche sur les moustiques ?
WIM Dans ce cas, le moustique tigre se serait définitivement installé chez nous et nous serions beaucoup plus affectés. Grâce à la surveillance et à la prévention, nous espérons pouvoir intervenir à temps et réduire l’impact.
Les personnes intéressées peuvent-elles également participer à ce projet ?
WIM Absolument ! Tous les Belges peuvent télécharger des photos de moustiques tigres sur la plateforme surveillancemoustiques.be. Si quelqu’un pense avoir vu un moustique tigre, il peut prendre une photo et la soumettre via notre site web Sciensano. Nous posons quelques questions pour préciser l’observation. Si nous pensons qu’il s’agit bien d’un Aedes albopictus et que l’endroit est intéressant, nous venons vérifier sur place. Au début, nous recevions des signalements de divers moustiques, mais de plus en plus, il s’agit bien du moustique tigre.

Les moustiques sont-ils des insectes utiles ? Nous avons lu l'autre jour dans De Morgen qu'ils peuvent aider à détecter les catastrophes naturelles, par exemple.
WIM C’est l’éternelle question. Les moustiques font partie de notre écosystème et servent entre autres de nourriture à la vie aquatique. Mais ils représentent surtout une nuisance et un risque pour notre santé. C’est pourquoi nous nous concentrons sur la lutte contre les espèces susceptibles de propager des maladies. L’élimination totale des moustiques n’est ni réaliste ni souhaitable, mais la réduction du risque de transmission des virus l’est.
Que peut-on faire chez soi pour se prévenir du moustique tigre ? Faut-il s'inquiéter ?
WIM Actuellement, le risque de transmission du virus en Belgique est encore minime, mais nous voulons qu’il le reste. La mesure la plus importante est de prévenir la reproduction du moustique. Le moustique tigre pond ses œufs dans l’eau stagnante, souvent dans de petits récipients tels que des seaux, des jouets, des plats de plantes ou des abreuvoirs pour animaux. Il est donc essentiel de changer ou d’enlever l’eau régulièrement. Il n’est pas nécessaire d’enlever les plantes ou les arbres, à condition de veiller à ne pas laisser d’eau stagnante sur place.
Avez-vous une histoire remarquable à raconter dans le cadre de cette recherche ?
WIM Ce que nous entendons souvent de la part des personnes que nous visitons sur place, c’est qu’elles ont un lien évident avec les régions où le moustique tigre est déjà implanté. Par exemple : « Depuis que j’ai déménagé de France, je suis dérangé par ces moustiques. ». Ou encore : « J’ai ramené des plantes de France et depuis, je les vois ». Cela montre comment le moustique se propage. Il se faufile dans notre circulation et s’installe dans les habitats qui lui conviennent.
Les personnes qui souhaitent contribuer au projet peuvent le faire volontairement ?
WIM Oui. Il suffit de prendre une photo et de la télécharger via surveillancemoustiques.be. Si nous pensons qu’il s'agit d'un moustique tigre, nous prendrons contact avec la personne. En fonction de la situation, nous nous rendons sur place.
Que se passe-t-il en cas de détection d'un moustique tigre ?
WIM MEMO+ est un programme de surveillance financé par le gouvernement fédéral et les régions. Lorsque nous recevons un rapport, nous le transmettons aux autorités compétentes, qui décident ensuite d’une éventuelle action de lutte. Des mesures de lutte efficaces sont également prises dans les endroits où le moustique tigre s’est installé.
Cette action s'inscrit-elle dans la grande campagne que le Département des Soins lancera en mai ?
WIM Oui, jusqu’à présent, l’accent a été mis sur les larvicides tels que le Bti et les contrôles de porte-à-porte pour éliminer ou traiter les aires de reproduction. Aujourd’hui, le Département des soins souhaite mettre l’accent sur des mesures proactives : que pouvez-vous déjà faire vous-même pour éviter d’avoir à recourir à des professionnels ? C’est une bonne chose que l’on accorde de plus en plus d’attention à cette question, tant au niveau régional que fédéral. Il y a encore beaucoup de travail à faire, mais des pas sont faits dans la bonne direction.
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Wim Van Bortel : wvanbortel@itg.be
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Wim Van Bortel
Wim Van Bortel (PhD) est un entomologiste médical qui a plus de 25 ans d'expérience dans la recherche sur les vecteurs et les maladies à transmission vectorielle en Europe, en Afrique et en Asie. Il a obtenu sa maîtrise en biologie à l'université d'Anvers en 1990, puis s'est spécialisé en entomologie médicale à l'Institut Pasteur de Paris. En 2002, il a obtenu son doctorat à l'université d'Anvers. De 2010 à 2016, il a été expert principal en maladies à transmission vectorielle au Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), où il était chef adjoint du programme sur les maladies émergentes et à transmission vectorielle. Depuis 2017, il travaille en tant que chercheur principal au sein de l'Unité d'entomologie et de l'Équipe de Recherche sur les Épidémies de l'IMT.
Ses recherches se concentrent sur l'élucidation du rôle des arthropodes vecteurs dans les systèmes de transmission, dans le but d'améliorer la prévention et le contrôle des maladies à transmission vectorielle dans un contexte de santé publique. En tant que membre de l'équipe de recherche sur les épidémies de l'IMT, il cherche à mieux comprendre les facteurs qui influencent la transmission et la propagation des maladies sujettes aux épidémies et à évaluer les différentes stratégies de prévention et de contrôle des épidémies.

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